(Petites pièces de monnaie)- «Je n’ai pas de petites pièces de monnaie ». c’est la phrase qui fait actuellement fureur dans tous les coins de vente. Derrière ce problème se cache une faille structurelle qui mine l’économie ouest- africaine : la pénurie chronique de petite monnaie dans l’espace UEMOA.
Sur le papier, tout va bien, le franc CFA est réputé pour sa stabilité, solidement arrimé à l’euro. L’inflation est maîtrisée, les investisseurs rassurés. Mais dans la pratique, régler un achat de quelques centaines de francs présente souvent une difficulté sans précédent. Cette pénurie est n’est pas anodine.
Le système bancaire alimente l’économie en billets de 5 000 et 10 000 francs. Les coupures plus petites, indispensables pour les transactions quotidiennes, s’évaporent dans les marchés et les transports. Les commerçants, conscients de leur rareté, les gardent jalousement comme une ressource stratégique. Quant aux pièces, elles circulent peu, jugées encombrantes et coûteuses à produire.
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Cette pénurie a des conséquences bien réelles. Chaque jour, des milliers d’heures sont perdues à chercher la monnaie, avec une perte de productivité pour tous. Chaque prix arrondi faute de monnaie renforce une inflation perçue plus forte que l’inflation réelle. Pire encore, ce manque de monnaie alimente des tensions sociales telles que des disputes qui éclatent régulièrement pour quelques pièces, parfois avec des issues violentes. Le mobile money aurait pu être une alternative crédible. Mais dans l’UEMOA, les micro- transactions restent coûteuses et peu encouragées. Payer 300 ou 500 francs via téléphone demeure difficile, voire impossible, là où des pays voisins comme le Ghana ont su bâtir un écosystème accessible, avec des frais quasi nuls sur les petites transactions.
La rareté de petite monnaie ne relève pas seulement d’un problème logistique. Elle traduit une déconnexion entre une politique monétaire centrée sur la stabilité macroéconomique et les besoins quotidiens des populations. Il urge donc que la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et les États prennent les mesures idoines afin d’imposer davantage de petites coupures dans les distributeurs, d’organiser la recirculation des pièces, et surtout rendre les paiements digitaux réellement accessibles et bon marché. Car au fond, la confiance dans une monnaie ne se mesure pas seulement à son ancrage à l’euro ou à ses ratios de stabilité. Elle se joue dans la vie de tous les jours, dans la possibilité d’acheter son pain ou de payer son taxi sans bloquer la file pour cause de « monnaie introuvable ». Tant que ce paradoxe persistera, le franc CFA restera solide pour les institutions, mais fragile dans la poche des citoyens.
Rostand HOUNWANOU














